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Europe – La Cour de justice de l’Union européenne a considéré, dans un arrêt du 23 octobre 2025 (C‑221/24 et C‑222/24), que lorsque l’autorité compétente d’un pays d’expédition découvre un transfert illicite de déchets et décide de reprendre ces derniers au titre de l’article 24, paragraphe 2, premier alinéa, sous c), du règlement no 1013/2006, cette disposition lui impose de procéder à la valorisation ou à l’élimination desdits déchets

La Cour de justice de l’Union européenne était saisie d’une question préjudicielle par la cour d’appel de Stockholm, section des affaires immobilières et environnementales.

L’affaire dont elle doit connaître concerne deux sociétés qui voulaient procéder à un transfert de conteneurs au départ de la Suède à destination du Cameroun, via la Belgique, et de la République démocratique du Congo, via l’Allemagne.

Estimant que les conteneurs contenaient des déchets, y compris des déchets dangereux, l’Agence suédoise de protection de l’environnement conclut à un transfert illicite de déchets à destination de pays tiers et les a informés que les deux conteneurs devaient être renvoyés en Suède.

Les sociétés expéditrices ne pouvant assurer le retour des conteneurs en Suède, l’agence organise le voyage et procède aux notifications de transferts prévues par l’article 24, paragraphe 2, troisième alinéa, du règlement no 1013/2026. Elle s’identifie en qualité de notifiant et de responsable du transfert et indique une installation de réception des déchets agréée en Suède où les déchets étaient transférés en vue de leur valorisation.

Les sociétés expéditrices ont chacune introduit un recours devant la juridiction de première instance contre les décisions de l’agence. En accueillant partiellement les deux recours, cette juridiction a expliqué que, dans la mesure où ces décisions prévoyaient le traitement du contenu des conteneurs par l’agence, elles portaient atteinte au droit de propriété, alors qu’aucune base juridique ne le permettait.

L’agence a interjeté appel de ce jugement devant la juridiction de renvoi en faisant valoir que, si l’article 24, paragraphe 2, premier alinéa, sous c), du règlement no 1013/2006 devait être interprété comme ne permettant pas à l’autorité compétente du pays d’expédition de valoriser les déchets dans le pays d’expédition lorsque l’exportateur ne les a pas repris et est considéré comme n’étant pas en mesure de les traiter d’une manière appropriée,

La Cour d’appel de Stockolm se demande, d’une part, si les points c) et d) de l’article 24, paragraphe 2, premier alinéa, du règlement no 1013/2006 s’appliquent de manière alternative et, d’autre part, si une reprise des déchets sur le fondement du point c) comporte pour l’agence l’obligation ou seulement la faculté de procéder à leur élimination ou valorisation. Par ailleurs, elle s’interroge sur la compatibilité d’un tel effet avec le droit de propriété.

Pour la Cour de justice, il ressort des termes mêmes de l’article 24, paragraphe 2, premier alinéa, sous c), du règlement no 1013/2006 que la reprise, par l’autorité compétente du pays d’expédition, de déchets faisant l’objet d’un transfert illicite en vue de leur valorisation ou élimination, s’applique à titre subsidiaire, cette autorité intervenant uniquement lorsque le transfert illicite de déchets est le fait du notifiant et que ce dernier n’a ni repris ces déchets ni, a fortiori, démontré sa volonté ou sa capacité à les gérer d’une manière écologiquement rationnelle ou qu’il est susceptible de tenter de nouveau de les transférer illicitement.

Ainsi, eu égard au caractère subsidiaire de l’intervention de l’autorité compétente, la reprise de déchets par cette dernière n’est pas constitutive d’une privation de propriété, au sens de l’article 17, paragraphe 1, de la Charte. Il n’en demeure pas moins qu’une telle mesure constitue une limitation à l’exercice du droit de propriété, relevant de la réglementation de l’usage des biens, au sens de l’article 17, paragraphe 1, troisième phrase, de la Charte, dès lors que la destination de ces déchets doit nécessairement être leur valorisation ou leur élimination.

Elle rappelle que le droit de propriété garanti par l’article 17, paragraphe 1, de la Charte n’est pas une prérogative absolue et que son exercice peut faire l’objet, dans les conditions prévues à l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, de restrictions justifiées par des objectifs d’intérêt général poursuivis par l’Union.

En l’occurrence, pour la Cour :

  • l’exigence prévue à l’article 52, paragraphe 1, de la Charte, selon laquelle les restrictions à l’exercice du droit de propriété doivent « être prévues par la loi » est satisfaite, dès lors que l’article 24, paragraphe 2, premier alinéa, sous c), du règlement no1013/2006 doit être interprété comme obligeant l’autorité compétente du pays d’expédition à valoriser ou à éliminer les déchets repris, ce qui est susceptible de restreindre le droit de propriété de leurs propriétaires ;
  • la protection de l’environnement et de la santé humaine, qui constitue l’objectif principal du règlement no 1013/2006, figure parmi les objectifs d’intérêt général susceptibles de justifier des restritions pouvant être apportées au droit de propriété ;
  • la reprise des déchets par l’autorité compétente du pays d’expédition aux fins de leur valorisation ou élimination à la suite d’un transfert illicite, en ce qu’elle garantit le traitement de ces déchets, est conforme au principe de proportionnalité. En effet, d’une part, une telle reprise est apte à préserver l’objectif de protection de l’environnement et de la santé humaine, et, d’autre part, les inconvénients causés, à savoir, en l’occurrence, les restrictions apportées au droit de propriété, ne sont pas disproportionnés par rapport à cet objectif.

Pour accéder à l’arrêt, suivez le lien : https://curia.europa.eu/juris/document/document.jsf?text=&docid=305420&pageIndex=0&doclang=fr&mode=req&dir=&occ=first&part=1&cid=5296443.

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